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lundi 19 novembre 2007

Harmonie ou équilibre : l'importance du respect des règles sur wikipédia

Comment faire en sorte que des contributeurs d’opinion contraires contribuent harmonieusement ? Grâce aux règles de neutralité de point de vue et de sourçage.

Je suis entré ces derniers temps dans plusieurs conflits (au moins quatre) qui auraient tous pu être évités si tous les contributeurs appliquaient les règles de wikipédia. Les règles de sourçage sont essentielles, on peut les lire dans la Charte du contributeur scientifique. Il faut selon cette charte répéter l’idée la plus couramment admise dans la « communauté scientifique ». Où trouver cette idée quand on cherche la définition d’un concept comme l’anarchisme ?

Réponse : dans les encyclopédies et les dictionnaires, qui reflètent le consensus des spécialistes.

Mauvaise réponse : dans les citations d’auteurs anarchistes ou sympathisants. Ces citations sont des sources primaires, en bonne logique il est interdit à un utilisateur de les utiliser directement. Qui peut garantir que ces citations illustrent au mieux le point de vue de leur auteur ? Personne. Qui peut garantir que ces citations ne sont pas sorties de leur contexte ? Personne. Pourquoi ces auteurs plutôt que d’autres ? Pourquoi ces auteurs nous offriraient-ils une définition neutre et non partisane ? Au fond, ces auteurs et leurs citations ne sont-ils pas choisis en fonction du point de vue qu’on veut avancer ? Bref, la tentative de définir un concept grâce à des auteurs qu’on a choisi en fonction de sa propre définition personnelle de ce concept est un serpent qui se mord la queue, une aberration.


La Charte indique par ailleurs qu’un wikipédien ne saurait valablement argumenter contre l’opinion la plus couramment admise dans la communauté scientifique. Mais bien évidemment il peut discuter de la représentativité de l’opinion qu’on lui oppose, contester qu’une opinion représente cette opinion dominante. Il ne peut par contre invoquer un soi-disant biais monarchique des encyclopédies pour les écarter (véridique).

Les opinions autres que celle la plus couramment admise dans la communauté scientifique ont leur place dans l’encyclopédie. Elles doivent être attribuées et une place correspondant à leur importance doit leur être accordée.

Mais au final, la passion l’emporte sur la raison et les articles polémiques demeurent globalement interdits d’accès aux personnes qui n’adhèrent pas à l’opinion majoritaire des contributeurs intéressés (notons quand même qu’il est bien normal que soient expulsés trolls et incompétents les plus évidents).


Hors le respect des règles, l’encyclopédie est contrainte de trouver sa neutralité dans l’équilibre et pas dans l’harmonie : une règle tacite s’installe : vivre et laisser vivre, chacun chez soi.

vendredi 16 novembre 2007

Guérilla contre légitimité

Dans la guerre du Vietnam, les Etats-Unis sont écartés entre leurs principes de démocratie et de droits de l'homme et leur doctrine qui leur commande de soutenir à l'autre bout du monde un régime autocratique qui s'oppose aux communistes, dont le régime contredit au moins autant la démocratie et les droits de l'homme que celui de Diem. Dans ce passage tiré du livre Diplomacy, Kissinger expose en quoi le renversement de Diem, l'autocrate de Saigon, profite à la guerilla et pas aux Etats-Unis. Une leçon qui s'applique parfaitement au cas irakien.

Ultimately, every revolutionary war is about governmental legitimacy; undermining it is the guerillas' principal aim. Diem's overthrow handed that objective to Hanoi for free. As a consequence of Diem's feudal style of government, his removal affected every tier of civil administration down to the village level. Authority now had to be rebuilt from the ground up. And history teaches this iron law of revolutions: the more extensive the eradication of existing authority, the more its successors must rely on naked power to establish themselves. For, in the end, legitimacy involves an acceptance of authority without compulsion; its absence turns every contest into a test of strength. (Diplomacy, Kissinger, p655)

En Irak, la destruction de l'autorité dans l'anarchie conséquente au renversement de Saddam Hussein, sous le regard bienveillant des soldats américains, a considérablement renforcé la seule chose qui pouvait encore s'opposer aux Américains : une guérilla. Les Américains paient aujourd'hui leur idéalisme.

lundi 12 novembre 2007

Le discours de Fulton

Le 5 mars 1946, Winston Churchill, alors dans l'Opposition, prononce un discours à Fulton (USA) dans lequel il intime aux démocraties occidentales de réagir face au rideau de fer que l'URSS a posé en travers de l'Europe et derrière laquelle elle se construit une sphère d'influence. Il rejette la politique d'apaisement, réclamant l'ouverture de négociations, appelant à l'alliance des Américains et Britanniques autour de leurs principes de droits de l'homme et de démocratie pour prévenir la guerre et la tyrannie. Résumé de ce discours :


Les Etats-Unis sont à l’apogée de leur pouvoir. Il faut saisir l’opportunité, adopter une stratégie globale pour la cause de la sécurité, du bien-être, de la liberté et du progrès, de « tous les foyers et familles des hommes et des femmes de ces terres ». Pour donner sécurité aux foyers, il faut les défendre contre la guerre et la tyrannie, notre tâche suprême est de les garder contre les horreurs et misères d’une nouvelle guerre.


Guerre/ (note : Churchill fait remarquer que les USA n’ont pas coopéré avec la GB dans l’entre-deux guerres) Il faut s’assurer de l’efficacité de l’ONU avant de songer aux désarmements. Elle devrait être dotée d’une force armée internationale. Le secret de la bombe atomique ne devrait pas être partagé avec l’ONU car trop jeune. Il ne faut pas non plus renoncer à la bombe atomique, le monde ne souffre pas de la détention par les Etats-Unis du savoir, des méthodes et des matières premières nécessaires à la bombe atomique. Si des pays communiste ou néofasciste avaient monopolisé cette technologie, ils auraient pu imposer un système totalitaire sur le monde libre et démocratique. Une large force de dissuasion doit prévenir ces pays de l’emploi de la bombe. A terme la bombe devrait être confiée à une organisation mondiale fraternelle et solide.

Tyrannie/ Les Etats-Unis et l’empire britannique ne doivent cesser de proclamer les grands principes de liberté et de droits de l’homme contre les Etats qui bafouent la démocratie et exercent un pouvoir sans contrainte à travers un parti privilégié ou une police politique. Tout pays doit pouvoir tenir des élections démocratiques et disposer d’une justice indépendante.

Une autre préoccupation existe : la misère. Si les dangers de guerre et tyrannie sont écartés, la science et la coopération conduiront au bien-être matériel.

Il faut une relation spéciale entre Britanniques et Américains : amitié mais aussi large coopération militaire incluant une appréciation commune des dangers, la similarité des armes, des échanges d’officiers. Les Etats-Unis devraient étendre la protection qu’ils offrent au Canada à tout le Commonwealth. De telles relations, dénuées d’intention agressive, ne nuisent pas aux Nations Unies, elles lui sont bénéfiques et sont indispensables. Américains et Britanniques doivent s’allier pour construire la paix et prévenir une nouvelle guerre encore plus rigoureuse.

Une ombre : personne ne connaît les intentions de la Russie soviétique et son organisation internationale communiste, et les limites, si elles existent, à ses tendances expansionnistes et prosélytes. Les Alliés comprennent les préoccupations russes à empêcher une nouvelle agression allemande et reconnaissent la place de la Russie parmi les nations. (note : Churchill cajole un moment les Russes)

Un rideau de fer est descendu sur l’Europe, derrière lequel se trouvent les capitales des anciens Etats d’Europe centrale et orientale. Ces villes se trouvent aujourd’hui dans ce qu’il faut appeler une sphère soviétique, sujettes du contrôle très fort et parfois croissant de Moscou. Les partis communistes d’Europe de l’est ont été élevés au pouvoir bien au-delà de ce que leur faible soutien populaire leur permettait. Des gouvernements policiers ont prévalu dans la plupart des cas. Seule la Tchécoslovaquie est une vraie démocratie.

(ndlr : Churchill oppose les conduites des soviétiques et des occidentaux) Turquie et Perse s’inquiètent des pressions exercées sur elles par le gouvernement de Moscou. Les Russes tentent de construire un gouvernement orienté communiste en Allemagne de l’est. En juin 1945, les armées américaines et britanniques s’étaient repliées hors du territoire conquis en Allemagne de l’est conformément aux accords (ndlr : mais contre l'avis de Churchill qui réprouvait cette concession sans contrepartie).

La construction d’une Allemagne communiste dans les zones occupées par les Soviétiques donnerait malheureusement aux Allemands la possibilité d'offrir leur soutien au plus offrant entre Soviétiques et démocraties occidentales. La sécurité de l’Europe repose sur une nouvelle Europe unie, de laquelle aucune nation ne devrait être exclue (ndlr : cad l’Allemagne). De par le monde, les cinquièmes colonnes communistes travaillent servilement sous les ordres du centre du communisme. A part dans le Commonwealth et aux Etats-Unis dans lesquels le communisme est encore en enfance, les partis communistes mettent en péril la civilisation chrétienne. Nous devons réaliser cette sombre réalité avant qu’il ne soit trop tard. La situation est également préoccupante en extrême-orient.

A l’époque du traité de Versailles chacun plaçait de grands espoirs selon lesquels les guerres étaient finies et la Société des Nations allait devenir toute puissante. Une telle confiance a disparu mais il ne faut pas croire la guerre inévitable ni imminente. Nos fortunes sont encore dans nos mains, nous avons le pouvoir de sauver le futur. Ce que veut la Russie n’est pas la guerre mais les fruits de celle-ci et la poursuite sans fin de l’expansionnisme de son pouvoir et ses doctrines. Pendant qu’il est encore temps, il faut prévenir de façon permanente la guerre et établir les conditions de la démocratie et de la liberté aussi vite que possibles dans tous les pays. Une politique d’apaisement ou fermer les yeux ne fera pas disparaître difficultés et dangers. Il faut un accord (settlement) sans délai.

Les Russes méprisent la faiblesse, particulièrement militaire. Si les démocraties occidentales restent unies autour de leur principes, personne ne leur fera du mal. La guerre contre l’Allemagne aurait pu être prévenue si seulement des actions avaient été entreprises en temps utile. Cette inaction ne doit pas se reproduire.

Si Britanniques et Américains s’allient, adhérant avec foi à la Charte des Nations Unies et se conduisant de façon désintéressée, il n’y aura pas une balance précaire des puissances, qui offre la tentation de l’aventure, il y aura une assurance extraordinaire de sécurité. Le chemin du futur sera libre, non seulement pour notre temps, mais pour un siècle.