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mardi 11 septembre 2007

Thatcher dans le texte

Ci-suivent trois extraits des mémoires de Margaret Thatcher, 10, Downing Street, Mémoires, paru chez Albin Michel en 1993. Ils proviennent tous du même chapitre 25 : « Babel Express, Les relations avec la Communauté européenne entre 1987 et 1990 » et sont remarquables par leur style et les idées exposées, bien plus raffinées que ce que l'opinion française en a retenue. Ils m'avaient frappé quand je les avais lu il y a quelques mois, je m'astreint enfin à les diffuser. Bonne lecture.

Sur la construction européenne, p.594 :

« Le projet fédéraliste franco-allemand était soutenu avec enthousiasme par des forces hétéroclites à l'intérieur de la Communauté - par les pays du sud les plus pauvres qui comptaient tirer une gratification substantielle de sa réalisation ; par les entreprises du Nord qui espéraient imposer leurs coûts élevées à leurs concurrentes ; par les socialistes en raison du champ qu'offrait le projet de l'intervention étatique ; par les chrétiens-démocrates, en raison de leur tradition fortement corporatiste ; et, bien sûr, par la Commission, qui le voyait comme le noyau du futur gouvernement supranational. [...]
« A la fin, toutefois, il n'y eut pas d'autre choix que de soutenir une position radicalement opposée à la direction que la plus grande partie de la Communauté semblait disposer à prendre, de brandir le drapeau de la souveraineté nationale, de la liberté du commerce et de la libre entreprise - et de combattre. Même si je devais me trouver « isolée » dans la Communauté européenne. Mais dans une perspective plus large, les vrais isolationnistes, c'étaient les fédéralistes, qui s'accrochaient opiniâtrement à une demi-Europe quand l'Europe dans son ensemble était en train de se libérer, qui flirtaient avec le protectionnisme quand des marchés réellement globaux émergeaient, qui se laissaient obséder par des projets de centralisation quand la plus gigantesque tentative de centralisation - l'Union soviétique - était au bord de l'effondrement. »

Sur les effets bénéfiques de la liberté du commerce à travers le monde, p604 :

« J'ai toujours considéré la liberté du commerce comme beaucoup plus importante que toutes les autres stratégies globales, ambitieuses et souvent contre-productives - par exemple les politiques de « croissance coordonnée » qui mènent principalement à l'inflation. La liberté du commerce permet aux pays pauvres de gagner des devises étrangères et d'élever le niveau de vie de leurs habitants. En outre, c'est aussi une force de paix, de liberté et de décentralisation politique : de paix, parce que les liens économiques entre nations renforcent la compréhension mutuelle en même temps que les intérêts mutuels ; de liberté, parce que le commerce entre individus contourne l'appareil d'Etat et diffuse le pouvoir parmis les consommateurs au lieu de le concentrer dans les mains des planificateurs ; de décentralisation politique, parce que la taille de l'unité politique n'est pas dictée par la taille du marché et vice versa. »

Sur la Révolution française, p618 :

« Pour moi, qui appartient à un courant dont le père, Edmund Burke, fut le premier grand critique perspicace de la Révolution, les événements de 1789 représentent une perpétuelle illusion de la politique. La Révolution française était une tentative utopique de renverser l'ordre traditionnel - qui avait certainement beaucoup d'imperfections - au nom d'idées abstraites, formulées par des intellectuels vaniteux, qui échoua - non par hasard, mais par la faiblesse et la méchanceté de ses acteurs - dans les purges, le meurtre de masse et la guerre. Sous bien des aspects, elle anticipait la bien plus terrible révolution bolchevique de 1917. La tradition anglaise de la liberté a, quant à elle, grandi à travers les siècles : ses traits les plus marqués sont la continuité, le respect de la loi et le sens de l'équilibre, comme l'a démontré la Glorieuse Révolution de 1688. »

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