Pour célébrer le bicentenaire de la naissance de Darwin, voici un post consacré à une théorie classique appliquée à la lumière du darwinisme : la coïncidence dans la nature du beau du bien et de l'utile.
D'abord, entendons-nous sur le sens du mot beau.
D'après le TLFI, le beau est ce "qui cause une vive impression capable de susciter l'admiration en raison de ses qualités supérieures dépassant la norme ou la moyenne". Et ce dictionnaire d'ajouter qu'une de forme du beau est que "l'impression s'exerce sur les sens de la vue ou de l'ouïe".
Je me permet ici d'employer le mot beau de façon plus générique en l'étendant à l'impression exercée sur un sens quel qu'il soit car, que la chose soit belle à l'oeil, sente bon au nez, soit bonne au goût ou douce au toucher, l'idée est au fond la même : la perception agréable d'un sens.
Pourquoi dans la nature, ce qui est bon et utile nous apparait beau, et inversement ce qui nous est néfaste nous apparait laid ?
J'établirai la régularité (I) puis je l'expliquerai par les mécanismes darwiniens (II). Enfin nous verrons pourquoi ceux qui se réclament de Darwin ont du mal à accepter ma proposition (III).
I ) La régularité naturelle entre beau, bien et utilité.
Je précise d'emblée et explicitement que je parle des produits naturels donc inutile de m'opposer whisky et camembert, produits artificiels, qui peuvent être beau (bon pour le goût) et néfaste à la fois ; ou encore les médicaments.
Ce qui est agréable à notre goût est bon et utile : est bon le goût des aliments, ne l'est pas celui des excréments. Nous préférons le cuit or le cuit, s'il détruit des vitamines, détruit également les parasites. Poison, moisi ont mauvais goût.
Ce qui est agréable à notre odorat est bon et utile : les aliments de nouveau. La fumée à l'inverse qui signale un feu et donc un grave danger, ou le risque d'intoxication est désagréable.
Ce qui est agréable à notre toucher est bon et utile. Nous aimons ce qui est doux. Brulant, gelé, râpeux, tranchant, qualités néfastes, ne sont pas agréables. Peut-être est-ce sens ou la coïncidence entre l'utilité et la sensation est la plus évidente : la blessure nous fait souffrir ; nous percevons immédiatement que la blessure est néfaste et qu'elle déplait à notre sensation.
Ce qui est agréable à notre vue est bon et utile. On dit que le ciel est beau ou moche suivant que le ciel est éclairé ou menaçant. Les caractères physiques qui nous apparaissent les plus beaux sont aussi les plus utiles : la qualité de l'œil comme celle des organes liés à la reproduction, forme des hanches, ventre et seins d'une femme. En revanche la maladie et la vieillesse sont laides.
Ce qui est agréable à notre ouïe est bon et utile. Un bruit inhabituel, surprenant, nous est désagréable, il signale un danger.
Ainsi dans la nature le beau coïncide avec le bon et l'utile et la liste donnée n'est sans doute pas exhaustive.
II ) Des mécanismes darwiniens.
Commençons par raisonner sur un cas extrême : supposons une personne attirée par une chose particulièrement néfaste, en effet il aime le goût de la viande décomposée. Il tombe malade et meurt, ses gênes ne se transmettent pas, ils disparaissent.
Prenons le cas d'un appétit pour les fruits pourris, l'homme porteur de cette caractéristique est fréquemment malade. Il est désavantagé absolument et relativement par rapport à ses pairs, ses gênes se transmettent difficilement et se marginalisent.
Plus compliqué, prenons le cas de l'homme qui préfère les fruits qui ne sont pas murs. En consommant ces fruits il nuit à son milieu naturel davantage que l'homme qui mange le fruit une fois mûr, pour la bonne raison qu'il nuit davantage à la reproduction des arbres générant ces fruits. De surcroit sa consommation requiert l'utilisation de davantage de ressources. Cet homme est avantagé contre son semblable car il va se nourrir avant lui relativement à un même fruit. Mais à l'échelle du groupe, le groupe qui présente cette caractéristique et qui donc consomme davantage de ressources et nuit à la bonne reproduction de ces ressources, va être désavantagé par rapport aux autres groupes car le monde dans lequel nous vivons est un monde de pénurie dans lequel les caractères les plus efficaces se répandent au détriment des autres.
In fine, c'est donc l'information du groupe qui préfère les fruits de la façon la plus utile cad murs qui va le mieux se diffuser par rapport aux autres et c'est pourquoi ce caractère se répand sur toute la terre.
Et c'est pourquoi aujourd'hui nous préférons les fruits murs.
Ainsi ce qui nous est utile, nous le trouvons beau (encore une fois, mon propos se limite aux choses naturelles). Une sélection naturelle est à l'origine de nos préférences naturelles. Rien n'est gratuit et tous nos caractères naturels ont ainsi une explication.
Ce lien entre beauté et utilité nous en apprend sur ce qu'est réellement la beauté. Elle n'est pas quelque chose existant de façon immanente. Elle est fondamentalement liée à la notion d'utilité. De même que la viande et la musculature d'un bœuf sont les deux faces d'une même réalité, la beauté et l'utilité correspondent dans la nature à une même chose.
L'homme peut rationnellement déterminer, calculer ou simplement avoir conscience d'où se trouve son utilité, tel n'est pas le cas de l'animal. L'animal a un comportement d'emblée efficace, qui s'appelle l'instinct. Et ce qui va guider l'instinct vers l'objet, c'est la sensation agréable que celui-ci procure, c'est ce qu'il trouve bon ; ce qui va l'éloigner est la sensation désagréable. Autrement dit l'instinct ce n'est pas quelque chose qui nous dirait fait ci ou fait cela, c'est plutôt quelque chose qui dispose nos perceptions de façon à nous faire sentir que ceci est agréable, cela ne l'est pas.
Ainsi la beauté est le vêtement d'une utilité cachée de même que le préjugé est le vêtement d'une raison cachée selon le mot parait-il de Maistre.
La coïncidence beauté/utilité est souvent inexploitée des commentateurs.
Prenons cet extrait,
L'auteur oppose deux raisons comme origine du caractère des yeux bleus, d'abord l'association avec un caractère qui facilite l'assimilation d'une vitamine dans les régions où la lumière est faible, ensuite la beauté des yeux bleus.
Cette alternative me semble fausse car comme je l'ai indiqué la beauté est la cause immédiate, que l'être perçoit tandis que l'utilité est la cause profonde et cachée. Ainsi il convient de dire que le caractère des yeux bleus s'est diffusé à la fois parce qu'il est beau et qu'il est utile. Cette utilité peut être celle citée, une utilité dans l'absolu, mais elle peut aussi être une utilité relative aux autres membres du groupe c'est-à-dire que l'ornement sert à se distinguer des partenaire reproductifs pour attirer les partenaires sexuels. Quelle que soit la solution retenue, il est erroné d'opposer utilité et beauté.
Notre même auteur cherche par ailleurs à déterminer le pourquoi des ornaments :
L'auteur nous explique dans cet extrait que les femelles paon préfèrent le mâle à la plus belle roue soit parce qu'elles doivent choisir le mâle dont la descendance sera la plus susceptible de plaire aux femelles, soit parce que cette roue révèle la robustesse (j'ajoute que la plus belle roue révèle un ensemble de caractères que les autres mâles du groupe ont admis comme supérieurs, supprimez cette roue et peut-être qu'un autre mâle sortira à son tour du lot).
Là encore ses développements me semblent critiquables puisque les deux raisons données ne s'opposent pas mais se combinent. La première amplifie juste le phénomène imprimé par la seconde.
III ) Une théorie qui rencontre des oppositions
J'ai pu remarquer que l'exposé de cette théorie provoquait spontanément des réactions hostiles et pas vraiment argumentées.
Par exemple ici :
* sur l'oracle
* sur un forum
Si vous vous rappelez d'autres endroits où j'ai pu développer cette idée, merci de les porter à ma connaissance.
En permanence me sont opposés des exemples qui oublient le prémisse selon lequel je me situe dans l'ordre des choses naturelles.
Souvent on tente d'opposer quelques obscurs contre-exemple comme si la marginalité du contre-exemple n'établissait pas la régularité du phénomène décris.
Je pense que ces oppositions sont dues à ce que cette théorie n'a pas la petite musique habituelle qu'entendent les partisans de Darwin, dont je suis.
La théorie selon laquelle le beau est bon est en effet une théorie classique qui a été oubliée. Alors que la théorie de Darwin semble souvent véhiculer hasard, relativisme et refus de l'absolu, en ce que l'état auquel nous nous adaptons (cf note 1) est contingent et indéterminé, l'idée que le beau et l'utile coïnciderait apporte une dimension objective, un fondement rationnel à la beauté.
Il me semble au fond que c'est cette idée qui dérange.
Note 1 : en réalité ce n'est pas tant l'individu qui s'adapte que la nature qui favorise le plus apte.
D'abord, entendons-nous sur le sens du mot beau.
D'après le TLFI, le beau est ce "qui cause une vive impression capable de susciter l'admiration en raison de ses qualités supérieures dépassant la norme ou la moyenne". Et ce dictionnaire d'ajouter qu'une de forme du beau est que "l'impression s'exerce sur les sens de la vue ou de l'ouïe".
Je me permet ici d'employer le mot beau de façon plus générique en l'étendant à l'impression exercée sur un sens quel qu'il soit car, que la chose soit belle à l'oeil, sente bon au nez, soit bonne au goût ou douce au toucher, l'idée est au fond la même : la perception agréable d'un sens.
Pourquoi dans la nature, ce qui est bon et utile nous apparait beau, et inversement ce qui nous est néfaste nous apparait laid ?
J'établirai la régularité (I) puis je l'expliquerai par les mécanismes darwiniens (II). Enfin nous verrons pourquoi ceux qui se réclament de Darwin ont du mal à accepter ma proposition (III).
I ) La régularité naturelle entre beau, bien et utilité.
Je précise d'emblée et explicitement que je parle des produits naturels donc inutile de m'opposer whisky et camembert, produits artificiels, qui peuvent être beau (bon pour le goût) et néfaste à la fois ; ou encore les médicaments.
Ce qui est agréable à notre goût est bon et utile : est bon le goût des aliments, ne l'est pas celui des excréments. Nous préférons le cuit or le cuit, s'il détruit des vitamines, détruit également les parasites. Poison, moisi ont mauvais goût.
Ce qui est agréable à notre odorat est bon et utile : les aliments de nouveau. La fumée à l'inverse qui signale un feu et donc un grave danger, ou le risque d'intoxication est désagréable.
Ce qui est agréable à notre toucher est bon et utile. Nous aimons ce qui est doux. Brulant, gelé, râpeux, tranchant, qualités néfastes, ne sont pas agréables. Peut-être est-ce sens ou la coïncidence entre l'utilité et la sensation est la plus évidente : la blessure nous fait souffrir ; nous percevons immédiatement que la blessure est néfaste et qu'elle déplait à notre sensation.
Ce qui est agréable à notre vue est bon et utile. On dit que le ciel est beau ou moche suivant que le ciel est éclairé ou menaçant. Les caractères physiques qui nous apparaissent les plus beaux sont aussi les plus utiles : la qualité de l'œil comme celle des organes liés à la reproduction, forme des hanches, ventre et seins d'une femme. En revanche la maladie et la vieillesse sont laides.
Ce qui est agréable à notre ouïe est bon et utile. Un bruit inhabituel, surprenant, nous est désagréable, il signale un danger.
Ainsi dans la nature le beau coïncide avec le bon et l'utile et la liste donnée n'est sans doute pas exhaustive.
II ) Des mécanismes darwiniens.
Commençons par raisonner sur un cas extrême : supposons une personne attirée par une chose particulièrement néfaste, en effet il aime le goût de la viande décomposée. Il tombe malade et meurt, ses gênes ne se transmettent pas, ils disparaissent.
Prenons le cas d'un appétit pour les fruits pourris, l'homme porteur de cette caractéristique est fréquemment malade. Il est désavantagé absolument et relativement par rapport à ses pairs, ses gênes se transmettent difficilement et se marginalisent.
Plus compliqué, prenons le cas de l'homme qui préfère les fruits qui ne sont pas murs. En consommant ces fruits il nuit à son milieu naturel davantage que l'homme qui mange le fruit une fois mûr, pour la bonne raison qu'il nuit davantage à la reproduction des arbres générant ces fruits. De surcroit sa consommation requiert l'utilisation de davantage de ressources. Cet homme est avantagé contre son semblable car il va se nourrir avant lui relativement à un même fruit. Mais à l'échelle du groupe, le groupe qui présente cette caractéristique et qui donc consomme davantage de ressources et nuit à la bonne reproduction de ces ressources, va être désavantagé par rapport aux autres groupes car le monde dans lequel nous vivons est un monde de pénurie dans lequel les caractères les plus efficaces se répandent au détriment des autres.
In fine, c'est donc l'information du groupe qui préfère les fruits de la façon la plus utile cad murs qui va le mieux se diffuser par rapport aux autres et c'est pourquoi ce caractère se répand sur toute la terre.
Et c'est pourquoi aujourd'hui nous préférons les fruits murs.
Ainsi ce qui nous est utile, nous le trouvons beau (encore une fois, mon propos se limite aux choses naturelles). Une sélection naturelle est à l'origine de nos préférences naturelles. Rien n'est gratuit et tous nos caractères naturels ont ainsi une explication.
Ce lien entre beauté et utilité nous en apprend sur ce qu'est réellement la beauté. Elle n'est pas quelque chose existant de façon immanente. Elle est fondamentalement liée à la notion d'utilité. De même que la viande et la musculature d'un bœuf sont les deux faces d'une même réalité, la beauté et l'utilité correspondent dans la nature à une même chose.
L'homme peut rationnellement déterminer, calculer ou simplement avoir conscience d'où se trouve son utilité, tel n'est pas le cas de l'animal. L'animal a un comportement d'emblée efficace, qui s'appelle l'instinct. Et ce qui va guider l'instinct vers l'objet, c'est la sensation agréable que celui-ci procure, c'est ce qu'il trouve bon ; ce qui va l'éloigner est la sensation désagréable. Autrement dit l'instinct ce n'est pas quelque chose qui nous dirait fait ci ou fait cela, c'est plutôt quelque chose qui dispose nos perceptions de façon à nous faire sentir que ceci est agréable, cela ne l'est pas.
Ainsi la beauté est le vêtement d'une utilité cachée de même que le préjugé est le vêtement d'une raison cachée selon le mot parait-il de Maistre.
La coïncidence beauté/utilité est souvent inexploitée des commentateurs.
Prenons cet extrait,
Why did this genetic change spread so successfully? There is no evidence that blue eyes help people survive. Perhaps the trait was associated with paler skin, which admits more of the sunlight needed for the synthesis of vitamin D. That would be especially important as people in less sunny northern climates became more dependent on grain as a food source, which is deficient in vitamin D. On the other hand, blue-eyed people may have had more descendants chiefly because they happened to be more attractive to the opposite sex in that geographic region. Either way, the explanation leads straight back to Darwin's two theories—natural and sexual selection.
L'auteur oppose deux raisons comme origine du caractère des yeux bleus, d'abord l'association avec un caractère qui facilite l'assimilation d'une vitamine dans les régions où la lumière est faible, ensuite la beauté des yeux bleus.
Cette alternative me semble fausse car comme je l'ai indiqué la beauté est la cause immédiate, que l'être perçoit tandis que l'utilité est la cause profonde et cachée. Ainsi il convient de dire que le caractère des yeux bleus s'est diffusé à la fois parce qu'il est beau et qu'il est utile. Cette utilité peut être celle citée, une utilité dans l'absolu, mais elle peut aussi être une utilité relative aux autres membres du groupe c'est-à-dire que l'ornement sert à se distinguer des partenaire reproductifs pour attirer les partenaires sexuels. Quelle que soit la solution retenue, il est erroné d'opposer utilité et beauté.
Notre même auteur cherche par ailleurs à déterminer le pourquoi des ornaments :
why a female would choose an ornamented male. It is a question that still excites biologists, because they have two equally good answers to it. One is simply fashion: When females are choosing gorgeous males, other females must follow suit or risk having sons that do not attract females. The other is more subtle. The tail of a peacock is an exhausting and dangerous thing for the bird to grow. It can only be done well by the healthiest males: parasites, starvation, and careless preening will result in duller plumage. So bright plumage constitutes what evolutionary biologists call an "honest indicator of fitness." Substandard peacocks cannot fake it. And peahens, by instinctively picking the best males, thereby unknowingly pass on the best genes to their offspring.
L'auteur nous explique dans cet extrait que les femelles paon préfèrent le mâle à la plus belle roue soit parce qu'elles doivent choisir le mâle dont la descendance sera la plus susceptible de plaire aux femelles, soit parce que cette roue révèle la robustesse (j'ajoute que la plus belle roue révèle un ensemble de caractères que les autres mâles du groupe ont admis comme supérieurs, supprimez cette roue et peut-être qu'un autre mâle sortira à son tour du lot).
Là encore ses développements me semblent critiquables puisque les deux raisons données ne s'opposent pas mais se combinent. La première amplifie juste le phénomène imprimé par la seconde.
III ) Une théorie qui rencontre des oppositions
J'ai pu remarquer que l'exposé de cette théorie provoquait spontanément des réactions hostiles et pas vraiment argumentées.
Par exemple ici :
* sur l'oracle
* sur un forum
Si vous vous rappelez d'autres endroits où j'ai pu développer cette idée, merci de les porter à ma connaissance.
En permanence me sont opposés des exemples qui oublient le prémisse selon lequel je me situe dans l'ordre des choses naturelles.
Souvent on tente d'opposer quelques obscurs contre-exemple comme si la marginalité du contre-exemple n'établissait pas la régularité du phénomène décris.
Je pense que ces oppositions sont dues à ce que cette théorie n'a pas la petite musique habituelle qu'entendent les partisans de Darwin, dont je suis.
La théorie selon laquelle le beau est bon est en effet une théorie classique qui a été oubliée. Alors que la théorie de Darwin semble souvent véhiculer hasard, relativisme et refus de l'absolu, en ce que l'état auquel nous nous adaptons (cf note 1) est contingent et indéterminé, l'idée que le beau et l'utile coïnciderait apporte une dimension objective, un fondement rationnel à la beauté.
Il me semble au fond que c'est cette idée qui dérange.
Note 1 : en réalité ce n'est pas tant l'individu qui s'adapte que la nature qui favorise le plus apte.
2 commentaires:
darwin ? http://www.maliki.com/strip.php?strip=116
kro meugnon :)
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